«Cancer-bio-santé : Pierre -Fabre prend toute sa place»

Laboratoires Pierre Fabre – Interview

Liberto Yubero, directeur général de l'Institut Pierre-Fabre et président du pôle de compétitivité Cancer-Bio-Santé./Photo DDM M. Labonne
Liberto Yubero, directeur général de l’Institut Pierre-Fabre et président du pôle de compétitivité Cancer-Bio-Santé./Photo DDM M. Labonne

Depuis le mois de juin, vous présidez le pôle Cancer-Bio-Santé. Quelle est votre feuille de route ?

Elle se résume à trois grands axes. D’abord, il s’agit de répondre au contrat de performance signé pour la période 2013-2018 avec les financeurs principaux que sont l’État, la région Midi-Pyrénées, la métropole de Toulouse. Il faut que nous passions du stade de l’usine à projets à celui d’usine à produits et à emplois. Nous devons accompagner les entreprises, y compris à l’international, pour créer de la valeur, aménager le territoire. Ensuite, en janvier va naître la nouvelle région. Afin de préserver les financements des pôles CBS et Eurobiomed, il faudra démontrer une réelle complémentarité et de la synergie. Enfin, nous allons plus travailler et collaborer avec les autres pôles et clusters, en s’ouvrant sur de nouvelles thématiques comme la médecine numérique ou les dispositifs médicaux connectés, même au-delà de nos nouvelles frontières administratives.

Peut-on imaginer une structure qui chapeaute Cancer Bio santé et Eurobiomed ?

Sincèrement, nous n’en sommes pas là même si, à tort, certaines rumeurs ont couru sur un rapprochement des pôles de Midi-Pyrénées et de Languedoc-Roussillon. L’objectif est de faire de la santé un des points forts de la future région.

Que pensez-vous de la concurrence que Toulouse et Montpellier se livrent sur l’implantation d’un centre de protonthérapie qui sert à traiter le cancer ?

Vous avez entendu l’ARS de Midi-Pyrénées le dire. Au mieux, il y aura un appareil dans la grande région. Peut-être même aucun. À force de se regarder en chien de faïence, d’autres, qui n’attendent que cela, vont compter les points. Le problème n’est pas de savoir qui va obtenir l’appareil, mais à quoi ou à qui va-t-il servir ? Va-t-on le valoriser entre Toulouse et Montpellier ? L’élargir à Barcelone qui en est dépourvu ? Ce type d’appareil doit bénéficier à toute une région, aux patients en priorité, mais également aux industriels de l’aéronautique et de l’espace qui pourront faire bombarder leurs composants électroniques par des protons. C’est une plateforme qu’on devra partager si on veut la rentabiliser.

Quel est le rôle du groupe Pierre-Fabre auquel vous appartenez au sein de l’Oncopole et de CBS ?

Le groupe Pierre-Fabre fait partie des entreprises, parmi d’autres, que le pôle accompagne dans ses projets. Ce qui a changé depuis le 23 juin, date de ma nomination, c’est la décision de Pierre-Fabre de prendre une part active dans Cancer-Bio-Santé. Nous avons besoin de croître et d’entraîner dans notre sillage des entreprises susceptibles de créer de la richesse économique dans la future région. Concernant l’Oncopole, nous faisons partie des membres fondateurs, avec d’autres industriels. C’est très important pour nous. La cancérologie représente la moitié de nos investissements en R & D. Ce qui ne serait pas normal, c’est qu’on n’y soit pas !

Sébastien Guérémy : « Donner plus de visibilité internationale à la filière santé de la grande région »

 Le premier comité stratégique commun de la filière santé en Languedoc-Roussillon et Midi-Pyrénées a réuni une centaine d’acteurs des deux régions à Montpellier. Retour d’expérience avec Sébastien Guérémy, chef du service développement industriel technologique et international de la Direccte [1] de (…)

Sébastien Guérémy, complémentarité ou compétition entre les filières santé des régions Midi-Pyrénées et Languedoc-Roussillon ?
Ce qui est sûr après cette réunion, c’est que nous avons les moyens de travailler ensemble sur nombre de sujets. L’oncologie est un exemple-type avec un vrai continuum, la région de Montpellier étant plus tournée vers la recherche fondamentale, celle de Midi-Pyrénées, vers la recherche clinique. Les préoccupations sociétales, incluant la silver économie, se rejoignent avec des services et des industries liés à la e-santé et au maintien à domicile. Les entreprises de la nouvelle région pourront aussi bénéficier de services communs. Ces synergies devraient permettre de donner à l’industrie de la santé de la nouvelle grande région plus de visibilité que Paca et autant que celle de Rhône-Alpes sur la scène internationale.

Dans la pratique, comment cela se concrétisera-t-il ?
Les deux comités stratégiques de santé ont déjà fusionné et se réunissent à nouveau au premier trimestre 2016 pour mettre en place des indicateurs de performance en termes de nombre de projets issus, nombre d’actions de communication, présences à des salons, etc.. Les agences régionales de santé (ARS) fusionnent elles aussi. Quant aux pôles de compétitivité Eurobiomed (couvrant Languedoc-Roussillon et Paca, NDLR) et Cancer Bio Santé pour Midi-Pyrénées, il n’est pas question de fusion mais plutôt de rapprochement. Le poids d’Eurobiomed, lié à son périmètre étendu et ses thématiques plus variées, est plus grand. Les deux présidents vont se rencontrer prochainement. A eux de décider ce qu’ils vont proposer prochainement.

La grande région sera-t-elle une nouvelle opportunité de marché pour les PME des deux régions ?
Nous y travaillons au travers des journées acheteurs qui réunissent, une fois par an, le public hospitalier et les entreprises ou start-up du médical de la région. Une rencontre entre les besoins hospitaliers et l’offre privée locale. A cette occasion, les acheteurs hospitaliers découvrent les innovations et solutions locales, ce qui facilite l’accès des PME à l’achat. Désormais, cette journée sera conjointe aux deux régions, d’où une possibilité de marché étendue pour les entreprises régionales. 
Propos recueillis par Isabelle Meijers
Photo DR

Notes

[1Direction régionale des entreprises, de la concurrence, de la consommation, du travail et de l’emploi

Le Toulousain Asept InMed envisage des acquisitions, tout en gardant son esprit de PME

Le distributeur en dispositifs médicaux à usage unique, filiale du groupe Medi-Globe, affiche une excellente santé, avec une croissance de 6 à 8% par an. Il envisage des rachats de sociétés dans le secteur.

Installée à Quint-Fonsegrives depuis 2004, la société Asept inMed connait depuis plusieurs exercices une croissance de 6 à 8% par an. En plus de travailler son portefeuille actuel de dispositifs médicaux à usage unique, le distributeur, filiale du groupe germano-américain Medi-Globe, étudie pour la première fois des pistes de croissance externe.

« Pour l’instant, nous ne faisons qu’identifier des cibles et prendre des contacts », assure son président Christophe Lehain. « Nous allons encore développer notre portefeuille existant mais, sur les produits où nous détenons déjà plus de 50% de parts de marché, cela a du sens de faire des propositions de rachat à des sociétés plus petites que nous, réalisant moins de 20 millions d’euros de chiffre d’affaires. A condition d’obtenir l’aval de Medi-Globe mais aussi de maintenir l’état d’esprit de PME qui règne dans l’entreprise ».

Se divisant pour moitié entre les dispositifs fabriqués sous les marques Asept InMed ou Medi-Globe et ceux pour le compte de tiers tels que l’Américain Kimberly Clark, le catalogue de la société comporte près de 800 références. Les dispositifs médicaux pour voies d’abord digestif, la spécialité de l’entreprise, représentent plus de 45% de son activité. Le reste se répartit entre les familles hygiène, voies respiratoires, cardiologie, accessoires de cathétérisme et urologie que la société vient d’intégrer.

Forte croissance sur le matériel de soin à domicile

Réalisant 60% de son chiffre d’affaires avec des établissements de santé privés et publics, la société toulousaine cible aussi les pharmacies, revendeurs et prestataires de soin à domicile. « Sur ce segment, nous connaissons une croissance à deux chiffres », indique le patron. « L’un des facteurs clés de ce développement est de proposer des produits qui répondent aux besoins des clients en terme de qualité, de fiabilité mais aussi de réactivité avec 98% des commandes livrées sous quarante-huit heures ».

En parallèle, Asept InMed a renforcé ses équipes commerciales depuis quatre ans : sur cinquante-huit salariés, vingt-cinq sont actuellement préposés à la vente directe. Pour permettre plus de réactivité dans les commandes, un nouveau local de stockage de 1000m² est en cours de construction pour porter la capacité du site à 3500m² en janvier 2016. Cette année, la société devrait ainsi dépasser les 35 millions d’euros de chiffre d’affaires, contre 16 millions en 2007, avec une rentabilité de l’ordre de 12%.
Julie Rimbert

Sur la photo : Christophe Lehain, président d’Asept Inmed. Photo Hélène Ressayres – ToulÉco.

Source ToulEco 06/10/2015

Santé : compétition ou « émulation collective » entre Toulouse et Montpellier ?

Toulouse et Montpellier ne doivent pas être en compétition sur le secteur de la santé, elles doivent collaborer : c’est le message passé ce matin par les acteurs de la filière, réunis à l’initiative de La Tribune-Objectif News sur le 1er Forum Santé Innovation à Toulouse. Alors qu’il existe certaines tensions entre les professionnels des deux métropoles sur le sujet de la protonthérapie, pas question de nourrir la polémique : « avoir deux centres reconnus en matière de santé est une chance, pas un problème », martèlent-ils. Le rôle des pôles de compétitivité est primordial.

Jean-Luc Moudenc, maire de Toulouse et président de Toulouse Métropole, a ouvert ce matin les débats du premier Forum Santé Innovation auquel ont assisté près de 300 personnes.

Il est le seul des intervenants à le reconnaître : « en matière de santé, la compétition entre Toulouse et Montpellier s’aiguise. » Avant d’ajouter néanmoins : « cette compétition n’empêche pas la coopération ».

Pour rappel, la tension est montée ces derniers jours entre les deux métropoles, qui souhaitent toutes les deux accueillir un centre de protonthérapie (un outil de pointe estimé à 40 millions d’euros, qui fera bientôt l’objet d’un appel d’offres). La question sous-jacente étant : qui de Toulouse ou Montpellier sera la capitale de la santé dans la future région ?

Présents sur la table ronde intitulée « Toulouse / Montpellier, l’éternelle compétition ? », les sept débatteurs (professionnels et institutionnels) ont refusé de parler de compétition, préférant évoquer une « émulation ».

« Deux métropoles spécialisées dans la santé : un problème de riches »

Pour Monique Cavalier, directrice de l’Agence régionale de santé (ARS) Midi-Pyrénées et préfiguratrice de la future ARS, Toulouse et Montpellier sont « deux villes de santé, avec chacune une offre publique et privée de grande qualité, deux villes universitaires, dont le marqueur ‘santé’ est historique ». D’ailleurs, quand la fusion entre Midi-Pyrénées et Languedoc-Roussillon sera effective, « cette nouvelle région se placera d’office à la troisième place derrière Rhône-Alpes et l’Ile-de-France dans les classements santé ».

 « On ne va quand même pas s’en plaindre ! Avoir deux métropoles spécialisées dans la santé, c’est, si j’ose dire, un problème de riches », sourit Monique Cavalier.

Une vision que partage Jacques Léglise, directeur général du CHU de Toulouse, pour qui « le problème n’est pas de savoir qui sera la capitale régionale de la santé. Le problème est de faire de la nouvelle région la capitale de la santé en France et en Europe. »

« Parler d’une compétition entre Toulouse et Montpellier est absurde et stérile », ajoute-t-il.

Protonthérapie : la « concurrence fratricide »

Pourtant, les deux villes souhaitent toutes les deux obtenir un centre de protonthétapie pour renforcer leur offre de lutte contre le cancer, mais aussi appuyer leur attractivité, leur visibilité et leurs partenariats avec les industriels. En effet, ce centre sera à la fois un outil de soin en pédiatrie, un outil de recherche sur les protons et un outil pour les industriels hors filière santé (pour les systèmes embraqués notamment).

« Qu’il soit dans une ville ou dans une autre, il faudra organiser la coopération pour que les chercheurs des deux villes puissent bénéficier de cet outil, et qu’il devienne un centre régional de protonthérapie », propose Jacques Léglise.

Tout en ajoutant : « Le projet de Toulouse me semble le meilleur et je me battrai jusqu’au bout pour que le centre soit à Toulouse. »

Pour Monique Cavalier, il faut se rendre à l’évidence : « la coopération Toulouse / Montpellier n’est pas une réalité de tous les jours. Ceci est normal car, jusqu’à présent, ces deux villes se suffisaient à elles-mêmes, elles étaient bien classées et n’avaient pas besoin l’une de l’autre ».

« Les dossiers protonthérapie ont été montés séparément bien avant que l’on annonce la fusion des régions. Maintenant, que le meilleur gagne. Attention simplement de ne pas se blesser dans une concurrence trop fratricide. »

Objectif commun : être visible sur la scène mondiale

Xavier Tabary vit à Toulouse et travaille Montpellier. Ainsi, pour le président du pôle de compétitivité Eurobiomed, les deux villes sont plus proches qu’elles n’en n’ont l’air : « Nos concurrents sont à Boston, Paris, Francfort. Les 200 kilomètres qui séparent les deux métropoles ne sont pas insurmontables. »

Car, au-delà des relations Toulouse / Montpellier, « c’est bien au niveau mondial que la compétition se joue », rappelle Daniel Rougé, 3e adjoint en charge de la coordination des politiques de Santé publique à Toulouse.

Il s’agit non seulement d’attirer les « big pharmas » mais aussi les chercheurs, les startups, les investisseurs. À l’image de la grande muraille de Chine, la filière santé de la nouvelle région « doit être visible sur Google Earth » scande Monique Cavalier.

Pour cela, les écosystèmes toulousains et montpellierains ne peuvent s’ignorer. Plusieurs initiatives ont été mises en route, et notamment le rapprochement des pôles de compétitivité Eurobiomed et Cancer Bio Santé.

« Pour être visible, il faut chasser en meute, s’entraider. L’alliance entre les pôles Cancer Bio Santé et Eurobiomed est naturelle », estime Xavier Tabary.

Les deux pôles pourraient-ils fusionner ?

Alliance ne signifie pas fusion des deux pôles.

« L’État ne demande pas aux pôles de fusionner mais ils peuvent le proposer s’ils le souhaitent », précise Rémi Ferrié, responsable du pôle entreprises, emploi et économie de la Direccte Midi-Pyrénée. « Le but est d’avoir des complémentarités. »

Ainsi, Xavier Tabary et Liberto Yubero (directeur de Cancer Bio Santé) envisagent davantage une spécialisation de chaque pôle : « Une spécialisation est tout à fait possible, affirme Liberto Yubero. CBS est déjà davantage axé oncologie et vieillissement, tandis que Eurobomied est davantage sur le diagnostic et les maladies infectieuses. » Cela pourrait permettre à des projets d’être labellisés par les deux pôles.

« Nous avons deux pôles de niveau équivalent, complète Rémi Ferrié, qui évoluent dans des écosystèmes équivalents : peu de grands groupes et beaucoup de PME. L’enjeu désormais est vraiment l’industrialisation. C’est ce que l’on demande aux pôles de compétitivité, c’est ce que l’on demande aux SATT. »

Jean Tkaczuk, président de la commission recherche au Conseil régional, appuie cette stratégie : « ce qui intéresse la Région, c’est la création de valeur. Nous soutenons les pôles pour soutenir les projets qui unissent laboratoires et entreprises. »

Pour Jacques Léglise, la « création de valeur » est déjà en marche : « avant, le milieu académique se détournait de tout ce qui était industriel. Aujourd’hui, les mentalités évoluent. Il y a des synergies. Nos chercheurs, dont certains font partie des meilleurs du monde, doivent déboucher sur des solutions et des produits industriels. »

Source La Tribune avec Objectifs News du 25/09/2015